jeudi 30 mars 2023

Vraiment Trop?

 

Chapitre 6. Vert, Voiture (blanche) et la luxure.

Vraiment trop ?

Midi. L’immense billard aurait aimé rester bucolique. Hélas, il était à présent déchiré de part et d’autre par une sangle grise. Droite mais convulsive, la Nationale quatre était aujourd’hui singulièrement calme. Peut-être trop.

X

X                             X

John avait pris le volant de la voiture de Rose. Blanche. Elle n’avait pas la tête à ça. D’ailleurs, elle n’aimait pas conduire. Plus encore aujourd’hui que d’habitude. Car elle s’en voulait presque; de n’avoir pu parler, de ne pas avoir pu exprimer ses ressentiments, sa jalousie, hier à la Brasserie Horta ! Mais voilà, à contrario… elle avait fondu, elle avait craqué devant ce message fleuri de son amant. Alors, elle avait de nouveau décidé. Décidé de le reconquérir, comme elle sait le faire, comme elle peut le faire ! C’est si simple ! Peut-être trop…

                                                               X

X                             X

Trop calme. Trop gris, devant lui. Les champs, verts à perte de vue autour de John, attendent. Attendent un signal. Futurs champs de bataille ? Comme une colombe, la tache blanche file sur la route, droit devant elle. John fonce et ressasse ce qu’il a entendu à la radio. Et il a froid. Froid dans le dos. Mais il a décidé de se taire. Le ciel, lui, est déjà plombé, orageux, suspendu à un simple fil…

-       -      « Je ne comprends pas bien : à chaque pompe à essence que nous rencontrons, des files importantes de véhicules sont à l’arrêt. De toute façon, je dois prochainement prendre du diesel. Veux-tu boire un verre pour te reposer quelques minutes? »

-         -      « Non, merci mon chéri. Ce n’est pas de cela dont j’ai soif pour l’instant… » répondit-elle, en esquissant quelques minauderies dont elle avait le secret.

Son allusion était on ne peut plus claire. D’ailleurs, il eût fallu être aveugle pour ne point se rendre compte de ses intentions : ce matin, elle s’était vêtue de manière si suggestive… Oui, le printemps était bien de retour. Et malgré ses inquiétudes, John ne manquerait pas une telle aubaine de cette nature.

Pourtant, peu après Marche-en-Famenne, à Bande, il quitta la route vers une pompe à essence voisine. Là aussi, de nombreuses voitures étaient à l’arrêt.

-          -     « Monsieur, pourriez-vous me dire ce qu’il se passe » ?

John revint, le visage déconfit. On aurait dit un gamin battu.

-       -      « Voici, Rose » balbutia-t-il. « Dans le train, j’avais entendu à la radio aux informations que la Chine était prête à attaquer l’Europe, avec le concours de l’Arabie Saoudite et l’Afrique du Sud. Ces partenaires sont en pour-parler, mais …une attaque cyber-terroriste vient d’avoir lieu : globalement, il n’y a plus d’électricité, et donc plus d’essence prochainement » s’étrangla-t-il.

 

 

                                               X

X                             X

 

Contre toute attente, John avait repris le chemin ; Saint-Hubert n’était plus vraiment loin. Rien n’était plus vraiment loin. Il faudrait simplement se relever, se battre, d’une manière ou d’une autre.

Dans un premier temps, Rose s’était effondrée, et sa vie semblait perdre tout son sens. Toutefois, rapidement, elle se ressaisit. Plus que jamais. Plus que jamais , il fallait saisir la vie, la prendre, la secouer !

Isa était si loin, maintenant.  Ses mains aussi.

-       -     « John, prends ce petit chemin forestier, là, à droite »

. S    Dans sa voix, il y avait déjà quelque chose de sauvage. Et le printemps, naissant, peut-être vert mais si sensuel, voulait le lui prêter, le temps d’un instant. Quelque chose qu’elle voulait partager, avec tous ceux autour d’elle. Plus uniquement avec John. Quelque chose qu’elle n’avait jamais risqué. Quelque chose qu’elle ferait, ici et maintenant ! C’est comme cela, John, que je vais te crier ce que je n’ai pas osé te dire hier, mais autrement !

A l’orée du bois, John pris la précaution de stopper la voiture. Bouleaux, chênes, mélèzes et, évidemment, hêtres, les attendaient. Impatiemment.

 

Maintenant, pour elle, c’était de trop : elle prit la main droite de John et la glissa sur sa cuisse sous sa mini-jupe, sans ménagement. C’était sa guerre à elle : elle explosa , sans modération. C’était ses bombes, ses missiles à elle !

-         -   " « Viens, mon chéri ! Sortons ! Viens près du chêne ! Et tant pis s’il rompt ! Et tant pis si tu as trop chaud…»

 "Car je m’en fous : j’ai de toute façon une revanche à prendre, mon cher John ! Et je sais que ça te plaira !"semblaient murmurer ses lèvres. En ôtant ses chaussures, elle s’exposa, en plein soleil, sans retenue aucune, en lingerie fine, aussi rouge qu’explosive.»

-       -     « Tu sais John, on peut parfois hésiter entre la plage et les Ardennes…Et bien, je vais te prouver que dans les bois, c’est bien aussi !»

6 commentaires:

France G. a dit…

Bonjour Patrick.
Rythme à couper le souffle et tu n’as pas raté la consigne de la luxure. Bravo ! J’ai toujours grand plaisir à lire ton écriture, même si, avec ce texte, je reste un peu désorientée par rapport à l’histoire. Quelle place aura ce conflit sous-jacent. Nos amants choisissant de batifoler, je me permets de rêver à la paix et à une fin positive. Bonne poursuite. Francoise

Andrée D. a dit…

Bonsoir Patrick,

Fidèle à toi-même, un texte percutant, qui commence TOUT en douceur et finit en explosion, Cela me fait penser au Boléro de Ravel.

LE Billard, la route, les pompes à essences, la Chine, et ses alliés dictateur, prête à attaquer l'Europe, la cyber attaque, la tension monte.

La tension monte aussi entre le couple, Rose a du savoir faire.

Phrases incisives, choix des mots de guerre, images flash, on voit danser Carmen, Rien à ajouter, la messe est dite !

Revenus à la réalité de ta fiction, qu'en est il de cette guerre de la Chine, sans son alliée, la Russie ???

OU tout ce récit ne se passe que dans les rêves de John, Rose soudainement si aguichante, étant absente.

Encore un dernier texte et puis une mise en page du tout.

bravo Patrick.

Amicalement

Ama




Jan M. a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Jan M. a dit…

Bonjour Patrick !
Le rythme saccadé à certains passages de ton écriture exprime très bien les moments d'angoisse suite à l'annonce d'une probable guerre mondiale. Ne compte plus que le moment présent, l'instinct de survie, et le plaisir qu'on peut encore tirer de ces minutes - peut-être les dernières - trop précieuses pour les perdre dans des réflexions morales ou intellectuelles. Il s'agit de rattraper ces instants de passion refoulés. Peu importe les vraisemblances stratégiques et militaires et les alliances entre nations auxquelles on ne s'attend pas. De toute façons d'où que viennent les obus, la terre est vouée à un orgasme explosif ! Ou un fou-rire collectif en dernier chapitre ? Je ne me permettrai certainement pas, cher Patrick, vu ton élan exalté, de suggérer quoi que ce soit - la surprise venant de toi sera bien plus intéressante.
Je te souhaite une fantastique fête de Pâques et que la poule aux oeufs d'or t'offre encore des oeufs magiques d'inspiration !
Bien amicalement
Christiane

Anonyme a dit…



Bonjour Patrik,
Texte intense. Est-ce parce que les mains de Isa sont loin que John a pu reconquérir Rose?
Les Ardennes dans les bois ça chauffe pour Rose et John, j'espère simplement qu'il ne va pas y rencontré Isa ou autres anciennes conquêtes qui vont le relancer. Avec l'annonce de ces terribles évènements peut-être que tous le monde voudra en profiter dans ce fameux bois.
Faite l'amour dans les Ardennes pas la guerre !
Joyeuses Pâques.
Super.
Merci
Nadera

Liliane a dit…

Bonjour Patrick,

Encore un texte très fort qui allie la poésie à la science-fiction et qui se termine par une superbe explosion de vie en réponse à la catastrophe. Remarquable utilisation de la consigne. Excellent choix de la catastrophe aussi : la pénurie partielle ou totale d’électricité est une menace malheureusement très crédible qui pèse sur nos sociétés qui en sont totalement dépendantes. Quant à la déclaration de guerre, l’alliance que tu proposes ne me paraît pas plus invraisemblable qu’une autre. Dans le contexte actuel, il me semble que tout est possible !
Si j’ai été passionnée par ton texte, j’ai cependant remarqué un mélange parfois peu heureux dans l’emploi des temps. Je t’ai faut quelques suggestions précises à ce sujet dans mes annotations.
Un détail, s’il n’y a plus d’électricité, c’est immédiatement que les pompes à essence sont bloquées : même si elles sont encore pleines, sans électricité elles sont inertes.

Le thème de ton prochain texte sera la paresse. La couleur dominante du texte le rouge et l’élément-surprise un violoncelle dont tu trouveras l’image au bas de ton texte annoté.
Bon travail.
Liliane